En droit allemand, distinction est faite entre le droit privé de la construction et le droit public de la construction, qui établit seulement les conditions dans lesquelles un projet de construction doit être autorisé par l´Etat; cela concerne donc les rapports entre le maître de l’ouvrage et l’Etat. Au contraire, le droit privé de la construction règle les relations juridiques entre les parties du contrat d´entreprise (entre l’entrepreneur, l’architecte ou l’ingénieur et le maître de l’ouvrage, ou entre l’entrepreneur principal et les sous-traitants), mais aussi entre les parties au contrat  et les tiers intéressés. Il convient de noter qu´en Allemagne les marchés publics sont également soumis au régime du droit civil. Par conséquent, les tribunaux civils (Amtsgericht, Landsgericht, Oberlandesgericht et Bundesgerichtshof) sont compétents pour trancher les litiges qui résultent d´un marché public.

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1. Siège de la matière

Les sources du droit privé de la construction se trouvent :

  • –    dans le Code Civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch, abrégé BGB), qui a incorporé en 2002 les dispositions de la Loi sur les conditions générales contractuelles (Gesetz ueber die allgemeinen Geschaeftsbedingungen, ou AGBG)
  • –    dans le Décret relatif aux courtiers et aux promoteurs-constructeurs immobiliers (Makler- und Bauträgerverordnung, ou MaBV),
  • –    dans le Réglement sur les honoraires des architectes et des ingénieurs (Honorarordnung fuer Architeckten und Ingénieure, ou HOAI),
  • –    dans la Loi  relative à la garantie des créances en matière de construction (Forderungssicherungsgesetz)
  • –    dans les Cahiers des charges générales de construction(Vergabe- und Vertragsordnung fuer Bauleistungen, ou les VOB, composés des VOB/A et du VOB/B), qui ont été établis pour les marchés publics (d’où leur nom, qui peut être traduit mot à mot comme « conditions d’attribution et de passation »), mais qui jouent également un grand rôle pour les marchés privés puisque les parties les adoptent habituellement pour leurs contrats. Les VOB/A (Allgemeine Bestimmungen fuer die Vergabe von Bauleistungen) traitent des règles d’attribution des marchés de construction, tandis que les VOB/B (Allgemeine Vertragsbedingungen fuer die Ausfuehrung von Bauleistungen) définissent en tant que conditions générales contractuelles le contenu des marchés de construction.

C’est tout de même dans le BGB que se trouvent les fondements du droit civil de la construction. Ses dispositions déterminent les conditions dans lesquelles un contrat de construction (contrat d´entreprise) ou un contrat d’architecte est conclu, ainsi que les obligations des parties. Il n’existe d´ailleurs pas de droit spécial des contrats d’entreprise pour les commerçants.

Récemment le législateur allemand est intervenu afin de renouveler le régime du contrat d´entreprise en droit allemand. Il a notamment révisé les articles 632 et 648a du Code Civil allemand et il a introduit une nouvelle loi relative à la garantie des créances en matière de construction

2. Conclusion du contrat

Deux déclarations de volonté unanimes sont nécessaires à la conclusion d’un contrat (la déclaration d’offre et celle d’acceptation, art. 145 du BGB). Les déclarations doivent porter sur les éléments essentiels du contrat; en règle générale, il suffit que les parties s’entendent sur la manière dont les prestations doivent être réalisées, leur étendue et la contrepartie à payer.

En ce qui concerne la validité de l’insertion de clauses pré-contractuelles dans le contrat (conditions générales), il faut se référer aux articles 305et suivants du BGB, bien que l’application de ces dispositions demeure limitée en ce qui concerne les commercants. Les personnes qui entrent dans le champ d’application des dispositions du BGB relatives aux conditions générales contractuelles (Allgemeine Geschaeftsbedingungenou AGB) doivent avoir pris connaissance ou avoir eu la possibilité de prendre connaissance de leurs dispositions. Tant que les parties n’ont pas convenu expressément d’utiliser les VOB, le contrat de construction sera régi par les art. 631 et s. du BGB.

Etant donné que les dispositions des VOB/B sont qualifiées de conditions générales contractuelles, elles doivent faire l’objet d’une mention expresse au contrat et respecter les exigences des articles 305 et s. du BGB sous peine d’application de la « règle de la main rouge ».

2.1. Offre et acceptation

Les déclarations de volonté des co-contractants se composent d’une offre et d’une acceptation de l’offre. Mais toute déclaration n’est pas une offre, de même que toute déclaration d’acceptation n’entraîne pas conclusion du contrat.

Ainsi, les annonces publiées dans la presse, les devis sans engagement et les offres distribuées par publi-postage ne constituent pas des offres au sens juridique du terme; ce ne sont que de simples invitations à contracter. Le contrat est conclu seulement lorsque la personne qui a publié l’annonce accepte l’offre effective émise par la personne intéressée.

Une déclaration d’acceptation qui modifie les termes de l’offre représente une nouvelle offre, qui pourra à son tour être soit acceptée, soit refusée.

2.2. Typologie des contrats

Le contenu d’un contrat se déduit d’abord des déclarations unanimes des parties, exprimées verbalement ou par écrit, le cas échéant dans un acte. On recourt aux dispositions législatives de manière complémentaire.

Le législateur répertorie une série de contrats typiques, tels que le contrat d’entreprise et le contrat de service (le droit français ne connaît pas la distinction entre le Werkvertrag (contrat d´entreprise) et le Dienstvertrag (contrat de service) qui coexistent en droit allemand, mais il distingue entre les obligations de moyens et de résultat), le contrat de courtage, le contrat mixte d’entreprise-vente, le contrat de vente, la location et le prêt.

Pour qualifier le contrat que les parties ont eu l’intention de conclure, la dénomination choisie par les parties a moins d’importance que leur volonté. Pour déterminer, le cas échéant, la volonté des parties, il est nécessaire de procéder une fois de plus à une intreprétation du contrat (art. 133, 157 BGB).

Or, la qualification du contrat a une grande importance car elle est décisive pour savoir si par exemple l´achitecte répond à une obligation de moyens (Dienstvertrag ou contrat de service) ou une obligations de résultat (Werkvertrag ou contrat d´entreprise).

2.2.1. Typologie législative des contrats

Le maître d’ouvrage conclura avec l’architecte un contrat d’architecte, classé habituellement parmi les contrats d’entreprise du type Werkvertrag (voir art. 631 et suivants du BGB) ; les architectes-conseils peuvent, le cas échéant, s’engager par un contrat de service du type Dienstvertrag.

Le contrat liant maître de l’ouvrage à l’entrepreneur sera également qualifié de contrat d’entreprise du type Werkvertrag. En règle générale, les obligations de l´entrepreneur qui résultent d´un contrat d´entreprise de type Werkvertrag sont de résultat.

Le matériel s’acquiert par un contrat de vente ; mais lorsqu’un courtier est chargé d’acquérir un bien immobilier, c’est le droit des courtiers qui est applicable.

La qualification du contrat conclu permet de savoir quelles dispositions s’appliquent en cas de défaut dans les prestations, de prestations tardives ou d’autres incidents d’exécution. Les obligations des parties se distinguent considérablement selon le type de contrat qui les lie.

Pourtant, les nouvelles manières d’appréhender et de concevoir le contrat soulèvent des difficultés. Ainsi, dans le cas d’un contrat de livraison d’une maison préfabriquée, est-ce qu’on doit appliquer les dispositions relatives au contrat d’entreprise (Werkvertrag), ou le droit de la vente? La solution semble être d’appliquer le droit de la vente lorsque l’entrepreneur livre une maison achevée proposée sur catalogue.

2.2.2. Contrats récurrents

Le droit du contrat de construction est pour l’essentiel un droit sophistiqué, dont les juristes, les entreprises de construction, les architectes comme les conseillers fiscaux s’en servent pour tout règler dans ses moindres détails.

Des formes typiques se sont pourtant  dégagées progressivement. On distingue le contrat d’entreprise générale (Generalunternehmer-vertrag ; contrat par lequel l’entrepreneur s’engage à réaliser et exécuter tous les travaux lui-même), le contrat de reprise générale (Generalübernehmervertrag, contrat par lequel l’entrepreneur s’engage à réaliser la conception et à sous-traiter l’exécution des travaux), le contrat de promotion immobilière (Bauträgervertrag), le contrat de coordination et le contrat de prestation simple.

Ainsi, le maître de l’ouvrage voulant construire un bâtiment clé-en-main conclura un contrat de reprise générale ou un contrat d’entreprise, car ces deux formes de contrat correspondent à un tel projet ; les obligations qui en découlent sont cependant essentiellement différentes car souvent, de lourdes obligations incombant au maître de l’ouvrage (Auftraggeber) peuvent se révéler au cours de l’exécution du projet sous la forme d’un facteur de majoration des coûts ou d’une exécution tardive des prestations.

D´ailleurs les VOB/B ne sont pas envisagés d´être utilisés pour les projets clé-en-mains. En revanche il est faisable de les adapter pour les besoins d´un tel projet. Or de plus en plus même en Allemagne les maîtres d´ouvrage pour de grands projets se familiarisent avec les Conditions FIDIC, afin de pouvoir passer des marchés sous des conditions compétitives au niveau international.

2.2.3. Contrats faisant appel aux VOB/B

Il convient de réitérer le constat: en Allemagne, les Cahiers de charges générales de la construction (VOB), conçus pour les marchés publics, ont été adoptés par l´industrie de construction comme conditions générales contractuelles à utiliser pour les marchés publics comme pour les marchés privés.

Les VOB/B distinguent les contrats de construction selon le mode de calcul de leurs prix, prévoyant la possibilité d’un accord sur un prix unitaire (Einheitspreisvertrag), sur un prix forfaitaire (Pauschal-vertrag), sur un prix en fonction du taux horaire (Stunden-lohnvertrag) ou encore du prix de revient (Selbstkostenvertrag).

A défaut de stipulation contractuelle expresse, c’est l’accord sur un prix unitaire qui s’appliquera par défaut pour le calcul de la rémunération (art. 2 n° 2 des VOB/B).

En présence d’un tel accord, les prix unitaires sont fixés pour une certaine unité de volume et pour différentes prestations techniques et économiques partielles. S’entendre sur un prix global unitaire implique une entente préalable sur les prix unitaires individuels, sans quoi le mandataire est en droit de fixer les prix selon l’art. 632 al. 2  en relation avec l’art 316 BGB.

Il est important, dans la phase précédant l’attribution du mandat (comparer phase 6 de l’art. 15 HOAI), de répertorier dans un bordereau les différentes prestations à effectuer, ce qui en règle générale est fait par l’architecte. Le bordereau doit contenir la dénomination des différentes prestations, les échéances et la description de chaque prestation, ainsi que des données quantitatives, car les calculs se font uniquement sur métré.

L’accord sur le prix forfaitaire ou ”marché forfaitaire” emporte souvent la préférence par rapport à l’accord sur un prix unitaire car il s’impose aux parties dès le départ. Le maître de l´ouvrage a intérêt ici à décrire la prestation attendue de la manière la plus détaillée possible afin d’empêcher définitivement toute prétention nouvelle de naître. D’autre part, l’entrepreneur aura intérêt à définir sa prestation globale de la manière la plus floue possible pour pouvoir revendiquer le maximum de prestations partielles possibles.

L’accord sur un prix en fonction d’un taux horaire n’intervient que dans les projets de petite envergure. Il convient surtout aux prestations qui ne se laissent pas aisément mesurer. Les VOB/B sont plutôt réservées par rapport aux facturations sur le taux horaire. En effet, l’étendue des travaux au taux horaire ne peut être soumise qu’à un contrôle á posteriori et ce calcul n’est pas facile à réaliser, ce qui rend nécessaire un accord exprès avant le début des travaux. Dans la pratique l´entrepreneur est tenu de produire des notes quotidiennes sur les travaux effectués qu´il doit présenter au maître d´ouvrage afin de les faire contresigner.

L’accord en fonction du prix de revient pose lui aussi la condition de l’entente préalable.

2.2.4. Différence entre l’accord sur le prix unitaire et l’accord sur le prix forfaitaire

Ce sont les prestations individuelles répertoriées dans le bordereau des prestations (Leistungsverzeichnis) qui servent généralement de base à l’accord sur le prix forfaitaire comme sur le prix unitaire. Dans ces deux cas, l’offre du mandataire s’exprime à la fin par une somme finale.

Pour un marché à prix unitaire (Einheitsvertrag), seuls les postes des prestations enregistrées sur le bordereau des prestations servent de base aux calculs. On s’entend sur des prix unitaires uniquement par unité de mesure, sans qu’il soit fait mention au contrat ni des prix finaux pour un poste donné, ni des sommes finales pour la totalité des postes. Lors des calculs prévisionnels, ces sommes sont précisées en fonction des prix unitaires établis par prestation et des prestations accomplies, qui ne seront déterminées que lors des métrés.

Choisissant un ”marché forfaitaire” (Pauschalvertrag), les parties s’entendent sur une prestation globale dont elles définissent la réussite. Elles désignent à l’avance une somme d’argent chiffrée comme rémunération des prestations fournies ; on pourra donc se dispenser du métré pour ce mode de calcul.

Indépendamment du mode de calcul l´entrepreneur a l’obligation d’exécuter la prestation de construction de sorte qu’elle comprenne toutes les prestations partielles nécessaires à l’achèvement de son oeuvre, conforme à son utilisation et ayant les qualités garanties. La rémunération de l´entrepreneur sera ou est fixé selon le mode de calcul convenu. Sur la base d´ un marché forfaitaire l´entrepreneur a droit au prix forfaitaire. Lorsque les parties du contrat ont convenu à un marché à prix unitaire (au métré) le prix final sera calculé sur la base des masses mesurées multiplié par le prix unitaire correspondant.

2.2.5 Facturation du ”marché au forfait” dérogeant au mandat initial

2.2.5.1. Le prix forfaitaire est en principe immuable : § 2 n°7 phrase 1 des VOB/B

Le prix forfaitaire établit une rémunération définitive pour la réalisation d’un projet de construction. En effet, l’art. 2 n°. 7 al. 1 phrase 1 des VOB/B dispose qu’en cas d’accord sur un prix forfaitaire, la rémunération déterminée par les parties est immuable, ce qui découle de la nature juridique même du forfait.

Autrement dit, lorsque les parties concluent un ”marché forfaitaire” pour une prestation de construction fixée contractuellement, elles déterminent par avance et de manière définitive la rémunération à recevoir en contrepartie de la prestation. Les parties sont liées par le prix qu’elles fixent.

Pour qu’une entente sur un prix forfaitaire soit valide, les parties doivent avoir suffisamment déterminé le contenu de la prestation rémunérée ; l’accord sera jugé suffisamment clair si la prestation est à l’évidence décrite sans ambiguité, c’est-à-dire par exemple si l’accord tient compte des différentes catégories de sols.

Le prix forfaitaire est donc intangible, quelles que soient les erreurs commises par le mandant dans la fixation du forfait. Si, dans le cas de prestations inchangées, des mesures ultérieures révèlent des prestations plus importantes, cela ne change pas en principe le prix forfaitaire décidé, dans la mesure où d’un examen objectif postérieur révèle que cela aurait été suffisamment prévisible par le mandataire.

Par conséquent, si le mandataire ne procède pas à des calculs assez précis avant l’accord et propose un forfait sur la base de calculs préliminaires, il sera lié par ce prix. Il en va de même lorsque le mandataire reconnaît les lacunes de la description de sa prestation, en cas d’offres visiblement sous-estimées à des fins spéculatives.

Le mandataire doit donc faire preuve d’une grande attention avant de s’engager sur la base d’un prix forfaitaire, en particulier lorsqu’il doit effectuer des calculs prévisionnels nécessaires à la détermination du prix de l’offre (par exemple en fixant la valeur des différents postes). Si le prix – par exemple d’une construction en acier – ne peut résulter que d’une estimation statistique et l’entrepreneur (Auftragnehmer) n’entreprend pas ou n’exige pas de la part du maître de l’ouvrage (Auftraggeber) qu’il entreprenne ces calculs, il ne pourra pas par la suite se défaire du forfait en invoquant le fait que la quantité d’acier dont il a effectivement fait usage dépasse celle mentionnée dans le dépôt de l’offre et dans le contrat.

2.2.5.2 Exceptions

La deuxième phrase de l’art. 2 n° 7 des VOB/B contient la stipulation suivante : si la prestation exécutée s’écarte de la prestation prévue au contrat d’une manière si considérable qu’un maintien du prix forfaitaire n’est plus acceptable (unzumutbar) dans le sens de l’art. 242 du BGB, une compensation qui prendrait en considération les surcoûts ou les moindres coûts, doit être accordée si requise.

Une adaptation du forfait est donc envisageable au titre de l’art. 2 n° 7 phrase 2 des VOB/B et de l’art. 242 du BGB lors des changements du contenu de la prestation de l’accord d’origine, dans la mesure où les éléments servant de base à l’estimation du prix changent (mais pas la cause du contrat ou Geschäftsgrundlage, dont la modification ou la disparition ne se produit qu’en des circonstances plus limitées).

Bien plus, la phrase 4 de l’art.2 n°7 des VOB/B indique clairement que les dispositions concernant la modification du prix contenues dans les n° 4, 5 et 6 du même article trouvent leur application également dans le cas des marchés forfaitaires (Pauschalvertrag), ce qui a une grande importance dans la pratique.

1) Modification du prix forfaitaire dans l’hypothèse de l’art.2 n°4 des VOB/B

Cet article décrit l’hypothèse dans laquelle l’exécution d’une partie de la prestation due par l’entrepreneur (le mandataire) en vertu du contrat initial est assumée par le maître de l’ouvrage lui-même (par exemple, si ce dernier fournit des matériaux de construction qui devaient être fournis initialement par l’entrepreneur), et renvoie à l’art. 2 n° 8 des VOB/B.

Il peut cependant arriver que les co-contractants, en dépit des §§ 2 n° 4 et 8 n° 1 des VOB/B, modifient de commun accord le contrat dans le sens d’une réduction du contenu de la prestation. La Cour d’appel de Francfort (OLG Frankfurt) a jugé dans ce cas qu’une application correspondante du § 2 n° 4 des VOB/B en relation avec § 2 n°. 8 al. 1 des VOB/B n’entre pas en ligne de compte : le mandataire conserve le droit à la compensation des prestations partielles non exécutées, après déduction des débours évités etc , même s’il a donné son accord pour diminuer le contenu de la prestation. Dans ce cas, à défaut d’entente des parties sur un nouveau forfait, le prix forfaitaire en vigueur à cette date doit être adapté pour correspondre aux prestations individuelles effectivement realisées pour constituer la prestation globale du mandat. La rémunération se fixe alors au pro rata en déduisant le forfait précédent.

2) Modification du prix forfaitaire dans l’hypothèse de l’art. 2 n° 5 des VOB/B

L’article 2 n° 4 des VOB/B ne concerne pas les cas de modifications de la prestation qui seraient exigées ou causées par le mandant (ce sont les cas réglés au § 2 n° 5 des VOB/B en relation avec le § 1 n° 3 des VOB/B).

Cela signifie que si à travers une modification des plans de construction ou des instructions du maître de l’ouvrage la base du calcul du prix forfaitaire prévu au contrat est modifiée, l’entrepreneur est en droit de demander un ajustement de la rémunération.

De tels changements, affectant les fondements même de l’estimation du prix faite par le mandataire, ne peuvent pas rester sans effets sur le forfait fixé dans l’accord. De ce fait, il a été jugé par la Cour d’appel de Francfort (OLG Frankfurt, NJW-RR 1986, 245), que n’est pas valable la clause insérée dans les conditions générales du maître de l’ouvrage, qui prévoit qu’une modification du contenu de la prestation inférieure ne donne droit à une modification de la rémunération tant qu’elle ne dépasse pas 10% du volume initial des prestations.

La Cour fédérale suprême (BGH) a toutefois une position contradictoire sur ce sujet : d’une part, par un arrêt du 8 janvier 2002, pris dans la formation du 10e Zivilsenat, elle a décidé que l’entrepreneur était en droit de réclamer l’ajustement du prix lorsque le maître de l’ouvrage a causé des modifications de prestations considérables qui n’ont pas été initialement prévues (cf. BauR 2002, 787, 790), mais, d’autre part, dans un arrêt du 12 septembre 2002, pris dans la formation du 7e Zivilsenat, la réclamation d’un ajustement a été admise à condition que la prestation effective n’ait pas causé un écart considérable avec le prix convenu (cf. BauR 2002, 1847).

3) Modification du prix forfaitaire dans l’hypothèse de l’art. 2 n° 6 des VOB/B

Une autre modification du prix forfaitaire peut intervenir lorsque l’entrepreneur réalise, avec l’accord ou à la demande du maître de l’ouvrage, une ou plusieurs prestations supplémentaires, qui, au moment de la conclusion du contrat, ne constituaient pas encore l’objet de l’accord sur le prix forfaitaire.

Le caractère supplémentaire des prestations s’apprécie selon ce qui a été convenu dans le contrat par les parties, et surtout ce qui est contenu dans le bordereau des prestations, les conditions spéciales ou techniques, les usages commerciaux ou encore le but de la prestation convenue.

Or, s’agissant de prestations supplémentaires, la prestation prévue initialement – dans la mesure où elle est effectivement exécutée – doit être rémunérée, dans le silence du contrat, au prix forfaitaire, alors que les prestations supplémentaires doivent être évaluées selon les prix unitaires.

Il n’y a cependant pas de forfait supplémentaire ou de forfait totalement nouveau en cas d’accord vicié, s’il y a certains critères objectifs sur la base d’une description de la prestation initiale. Un forfait dépend trop de la volonté subjective des deux parties au contrat, en particulier de l’entrepreneur (du mandataire). Si la prestation supplémentaire ne se rattache pas seulement à la prestation initiale, mais remplace (modifie) en partie celle-ci et accroît à la fois le contenu total de la prestation, on devra tenir compte du contenu total de la prestation au prix unitaire sans égard au forfait précédemment établi.

Dans la mesure où les prix unitaires sont fixés, cette détermination est réalisée au moyen des dispositions précédemment évoquées et sert de fondement à toute modification de prix résultant des mesures prises par le mandant. Une exception est contenue au § 2 n° 4 des VOB/B concernant les mesures attribuées au mandant, pour lesquelles c’est le § 8 n° 1 al. 2 qui s’applique. Les calculs se font ici seulement au moyen de ces dispositions, de même que dans tous les cas où le comportement du mandant doit être considéré comme une résiliation partielle ou qui entrent en tout cas dans le champs de l’art. § 2 n° 8 al. 1 des VOB/B.

Si le contenu de la prestation effective (correspondant à un poste du bordereau des prestations) révèle non pas une prestation supplémentaire mais une prestation moins importante, on devra souvent calculer la part restante d’après les prix unitaires comme valeurs de prolongement, proportionnellement au forfait qui en demeure la limite supérieure. La même chose vaut si le bordereau des prestations ne contient pas d’indices suffisants en matière de prix, en particulier si les prix individuels sont absents avec seulement le forfait global final et que l’on ne peut pas se représenter objectivement la manière dont il a été calculé.

Toutefois, ce n’est pas la règle : le plus souvent, le mandataire – avant même qu’on parvienne à un accord sur le prix forfaitaire – aura donné certains prix pour les postes individuels ou au moins pour des ensembles de postes. Il est alors possible, au besoin en faisant appel à un expert – cf.  § 7 des VOB/A-, d’appliquer le § 315 et s. BGB, relatif à la fixation d’un nouveau forfait sur la base d’une prestation effective moins importante. Sous cette condition, le jugement de la Cour d’appel de Duesseldorf (OLG Düsseldorf) du 30 novembre 1956 indique que, dans les marchés forfaitaires de prestation de services, en cas de prestations de construction non exécutées, la diminution du prix se fait en fonction du rapport existant entre les prestations non exécutées et celles restant à effectuer dans le cadre du marché forfaitaire.

4) Modification du prix forfaitaire dans l’hypothèse de l’art. 2 n° 8 des VOB/B

Bien que l´entrepreneur ne sera pas payé pour les prestations qu´il effectue sans mandat ou en s’écartant du mandat sans autorisation préalable du maître d´ouvrage, il est également possible d’avoir une modification du prix, résultant exceptionnellement de § 2 n° 8 al. 2 des VOB/B, car les conditions qui y sont énoncées ne dépendent pas du type d’accord sur le prix a été choisi au contrat ; cela vaut sans porter préjudice à d’autres droits issus du § 6 n° 6 ou 7 des VOB/B. A condition que (1) le maître d´ouvrage accepte de tels travaux postérieurement ou que (2) les travaux ont été nécessaires pour la réalisation du projet, qu´ils répondent également aux intentions présumés du maître d´ouvrage et qu´ils ont été notifié immédiatement au maître d´ouvrage, l´entrepreneur a droit à un prix supplémentaire.

Si les parties se sont entendues pour évaluer le projet de construction selon un prix forfaitaire, l’entrepreneur supporte le risque d’augmentation des coûts immanents au contrat puisqu’il est en principe lié par la rémunération de l’oeuvre ”prévue” dans l’accord. L’accord réalisé prend en compte avant tout l’intérêt du maître de l’ouvrage (du mandant) pour la détermination sûre des charges financières résultant du contrat. Il incombe à l’entrepreneur (au mandataire), de s’y adapter et d’intégrer également dans ses calculs de prix une augmentation prévisible des salaires et autres augmentations futures des coûts.

2.2.5.3 Conclusions quant aux marchés forfaitaires

Chaque modification de la rémunération doit correspondre dans un tel système de fixation du prix au principe d’équivalence, lequel est une représentation des deux parties de l’équivalence de leurs prestations. Dans les contrats de prestation de services comme dans les contrats de vente, les modifications de la rémunération sont en général inadaptées, lorsqu’elles permettent à l’entrepreneur de majorer unilatéralement et sans limitation le prix fixé, au-delà de l’augmentation effective des coûts (les coûts de salaire et de matériel), afin de gagner un profit supplémentaire.

Aux termes du § 2 des VOB/B, rappelons-le, la rémunération due ne constituera un prix forfaitaire que si les parties en ont expressément convenu.

L’article 2 des VOB/B part du principe – tout comme § 631, 632 BGB le font – que les parties s’accordent en général sur le montant de la rémunération.

Au § 2 n°1 des VOB/B il est immédiatement fixé quelles prestations sont couvertes par le prix de l’accord (notamment, celles contenues dans le bordereau des prestations, les conditions contractuelles spéciales, les conditions contractuelles supplémentaires, les conditions générales techniques pour les prestations de construction, ainsi que les prestations).

Il détermine plus loin alors, au § 2 n° 2 des VOB/B, que c’est l’accord des parties qui est prioritaire quant au mode d’évaluation de la rémunération (selon l’accord passé, les calculs sont faits selon les prix unitaires, selon la somme forfaitaire, selon les taux horaires ou selon les coûts supportés).

Le § 2 n° 2 des VOB/B doit obligatoirement s’appliquer lorsque le l’entrepreneur ne peut pas prouver qu’un accord avait abouti dans ce sens. Il est prescrit en effet que la rémunération sera calculée en fonction des prix unitaires et qu’elle doit être estimée telle qu’elle est réglée au contrat.

L’entrepreneur exigeant le salaire habituel (§ 632 du BGB) doit être en mesure de réfuter l’affirmation du maître de l’ouvrage, selon laquelle un salaire minimal fixé a été entendu; s’il n’y parvient pas, il n’a droit au salaire qu’à hauteur du montant que le mandant affirme comme ayant fait l’objet d’un accord. Cette conception est majoritaire dans la doctrine.

Toutefois, selon § 5 n° 1 b des VOB/A, l’attribution d’une somme forfaitaire doit survenir lorsque la prestation est déterminée d’aprés le mode de l’exécution et son ampleur, sous condition qu’aucune modification dans l’exécution n’est à prévoir.

La conclusion d’un marché forfaitaire n’est conseillée donc que dans certaines circonstances. Il ne faut pas déduire de § 2 n° 2 des VOB/B que les prix unitaires seraient toujours à calculer, si un accord sur le mode de calcul de la rémunération n’a pas lieu.

Ne pas reconnaître la conclusion d’un contrat au prix unitaire revient à ne pas reconnaître que les prix unitaires affirmés ont fait l’objet d’un accord quant à leur montant. Autrement dit, si l’on ne parvient pas à prouver quel mode de calcul a été pris dans l’accord, il est quasiment impossible de déterminer la hauteur des prix unitaires individuels. On devrait pourtant pouvoir calculer ceux-ci d’après les prix traditionnels ou adaptés. Le mandataire pourrait opposer de cette manière la rémunération habituelle au sens de § 632 al. 2 BGB même à l’encontre d’une affirmation de prix forfaitaire de la part du mandant. Ainsi, il est important de savoir que l’entrepreneur supporte la charge de la preuve et de la représentation pour chaque créance ultérieure, concernant les quantités comme les prix unitaires.

3. Exécution du contrat

L’exécution du contrat dépend également avant tout de la volonté expresse ou tacite des parties au contrat. A défaut de règle spéciale, on applique le droit du BGB.

3.1. La réception des travaux et sa signification

Les prestations de l’entreprise de construction prennent fin avec la réception des travaux. Le législateur allemand traite de la réception dans le § 640 BGB:

(1) Le maître de l´ouvrage est obligé de procéder à la réception de l´ouvrage conforme au contrat, pour autant que la réception ne soit pas exclue de par sa nature. La réception ne peut pas être refusée pour des défauts mineurs. La réception est réputée faite lorsque le maître de l´ouvrage ne procède pas à la réception de l´ouvrage à l´intérieur d’un délai raisonnable  fixé par l´entrepreneur, bien qu´il y soit obligé.

(2) Si le maître de l´ouvrage accepte un ouvrage défectueux conformément à l´alinéa 1 phrase 1, bien qu´ayant connaissance du vice, les droits décrits à l´article 634 numéro 1 à 3 ne lui reviennent que s´il se réserve, lors de la réception, le droit d’en faire usage.

La réception a pour conséquence l´exigibilité de la rémunération de l´entrepreneur. En même temps, l´obligation de l´entrepreneur, qui consiste à délivrer la chose se modifie en une obligation de ”Nachbesserung” (Cf. infra sous Vices).

De plus, le risque de perte ou de dégradation de la chose construite est transféré au mandant. La réception est donc une étape délicate; des réceptions partielles le sont aussi car elles ont également pour conséquence le transfert du risque. Il est conseillé de consulter un architecte.

3.2. Equivalents à la réception

A l’achèvement de la construction, le procès verbal final décrit formellement la réception; pourtant, il est souvent négligé en pratique. Le maître de l´ouvrage peut consulter un expert. La réception d’un bâtiment et de constructions partielles pourra également résulter de leur mise en exploitation ainsi que d’autres comportements tacites, excluant toute action en justice.

4. Vices

Les vices des prestations accomplies par les entrepreneurs peuvent être améliorés à tout moment jusqu’à la date de la réception. Une démolition du bâtiment est parfois nécessaire avant de procéder à sa reconstruction. Après que la réception ait eu lieu, les droits à l’amélioration du mandant sont limités. § 634 BGB prévoit le suivant:

Si l´ouvrage est défectueux, le maître de l´ouvrage peut, si les conditions des dispositions suivantes sont réunies et en l’absence de toute stipulation contraire,  

1. réclamer la réparation ultérieure au titre de l´article § 635,

2. supprimer lui-même le vice et réclamer un dédommagement pour les dépenses nécessaires au titre de l´article § 637,

3. résilier le contrat selon les articles §§ 636, 323 et 326 alinéa 5 ou, selon l´article § 638, diminuer la rémunération et

4. réclamer selon les articles §§ 636, 280, 281, 283 et 311a des dommages-intérêts ou, selon l´article § 284, réclamer une compensation pour de vaines dépenses.

Selon les VOB/B le mandant dispose d’un délai de garantie de 2 ans à compter de la date de la réception pour inviter par écrit l’entrepreneur à éliminer les vices. Si l’entrepreneur n’exécute pas cette obligation, le maître de l’ouvrage peut fixer un délai, dont l’échéance l‘autorise à confier le travail à un tiers.

Reste à noter qu’aux termes du § 639 BGB, l´entrepreneur ne peut pas se prévaloir d’une convention par laquelle les droits du maître de l´ouvrage relatifs au vices sont limités ou exclus, lorsqu´il a omis dolosivement de signaler le vice ou lorsqu´il a fourni une garantie pour les qualités de l´ouvrage.

5. Etablissement de la facture

L’établissement de la facture a une grande importance dans les métiers de la construction. En règle générale, les coûts de la construction ne sont fixés qu’à l’issue des travaux (selon l’art. 631 al. 1 du BGB, le mandant s’engage, à l’issue des travaux, à payer la contrepartie contractuelle).

Le législateur part du principe qu’il est généralement très rare dans un projet de construction que tout soit calculé dès le départ jusqu’aux moindres détails : les écarts quantitatifs sont courants et les données sont souvent corrigées au cours de la construction. Le maître de l’ouvrage a un droit de détermination étendu, qui se fait  sentir jusque dans les fondements du contrat. D’autre part, l’entrepreneur peut également émettre des réserves concernant certains paramètres de l’exécution, pouvant ainsi exiger la modification du déroulement de la construction.

Dans le cas où son montant n’est pas déterminé, et en présence d´une réglementation tarifaire, la rémunération sera considérée comme convenue selon ladite réglementation. En l’absence de reglémentation tarifaire, on considère la rémunération habituelle comme celle de l’accord des parties.

L’importante marge de manoeuvre conduit les tribunaux à ordonner en cas de conflit une expertise comme moyen de preuve. De ce fait, pour éviter les abus, l’entrepreneur doit établir une facture vérifiable (voir § 16 des VOB/B), même si dans la pratique il n´est pas facile d´établir une telle facture vérifiable. On doit constater que, très souvent, les juges ne sont pas satisfaits de la qualité des factures et rejettent des demandes en paiement pour non respect du devoir de présenter une facture vérifiable.

5. Echéance de la créance

Dans un contrat d’entreprise tel que régi par les dispositions du BGB, l´exigibilité de la rémunération de l´ouvrage dépend exclusivement de la réception de la chose construite (art. 641 al. 1 du BGB). Si le maître de l’ouvrage n´a pas droit à une facture vérifiable (voir ci-dessus), la créance arrive toutefois à l´échéance même en l’absence d’une telle facture.

En revanche, lorsque le contrat est soumis aux VOB/B, la rémunération de l´entrepreneur n´arrive à l´échéance que deux mois après l’expédition de la facture finale vérifiable. Cette faculté de contrôle est une condition essentielle de l’échéance, en l’absence de laquelle le tribunal saisi de l’affaire rejetera la demande en paiement ; l’entrepreneur maintient quand même le droit d’exiger le paiement de sa rémunération devant le tribunal. après avoir produit une facture finale vérifiable.

6. Différences par rapport au droit français

Le droit allemand n´a pas adopté la responsabilité décennale de l´entrepreneur et de l´architecte; il n´existe pas non plus de garantie de bon fonctionnement et de parfait achèvement.

L´entrepreneur en tant que sous-traitant n´a pas le droit de demander sa remunération du maître de l´ouvrage en cas de non paiement par l’entrepreneur principal (non existence de l´action directe). Les dispositions des art. 1799-1 et 2103 du Code Civil français n´ont pas d´homologue en Allemagne.

La remunération des architectes et des ingénieurs est réglée par la loi. Cette loi est d´ordre public et s´applique à toutes les toutes missions d´architectes et d´ingénieurs en Allemagne, et ceci également lorsque le droit applicable au contrat est un droit étranger. Il est fortement conseillé aux architectes et ingénieurs étrangers de se renseigner sur les dispositions de la loi allemande (la HOAI) lorsqu´ils désirent s´engager dans la réalisation un projet qui est situé sur le sol allemand.

7. Renseignements supplémentaires

Nous restons à votre entière disposition. Le cas échéant veuillez prendre contact avec Maître Dr. Hök, notamment également en ce qui concerne l´utilisation des Conditions FIDIC en Allemagne.